Afrique du Sud : gérer l’eau pour un avenir meilleur

Un expert de premier plan en matière de gestion de l’eau nous dévoile les nombreuses opportunités associées aux solutions durables.  

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Mario Carelse
Amélioration opérationnelle et innovation, Direction de l’eau et de l’assainissement de la ville du Cap

En 2015, après deux années consécutives de pluies abondantes, la province du Cap-Occidental a connu une période de sécheresse extrême. Pour la ville du Cap, ce fut le début d’une crise de l’eau pluriannuelle, comme nous n’en avions pas connu depuis plus d’un siècle et dont les conséquences furent particulièrement graves pour la ville comme pour ses habitants. Le terme tristement célèbre de « Jour zéro » a fait son apparition et s’est imposé à mesure que la sécheresse progressait, au point où l’on prévoyait de devoir couper l’approvisionnement en eau du Cap au risque d’assécher les canalisations de la ville. Les Sud-Africains utilisent en moyenne 235 litres d’eau par personne chaque jour, soit 36 % de plus que la moyenne mondiale qui s’élève à 173 litres par jour. Mais lors de la crise de l’eau au Cap, il a été demandé aux habitants de réduire leur consommation à 50 litres d’eau par foyer

Alors que Le Cap risquait de se retrouver sans eau sous 90 jours, l’introduction de méthodes innovantes pour atténuer la pression, d’une réduction soutenue de la consommation d’eau et de programmes efficaces de communication et de sensibilisation du public a permis d’éviter la catastrophe. Les changements climatiques posent des défis majeurs en termes de gestion des de l’eau dans tout le pays, et Le Cap n’a pas été épargné. Il en va de même en ce qui concerne la multiplication des quartiers informels, les délestages au niveau du système électrique et l’inadéquation des systèmes de gestion des risques visant à atténuer la pollution environnementale. 

La crise de l’eau au Cap a rappelé que les habitants/citoyens ne peuvent en aucun cas se permettre de « s’endormir au volant » face au risque de pénurie d’eau. Les normes ISO me fascinent et me tiennent particulièrement à cœur, c’est pourquoi je me suis donné pour mission de les intégrer pleinement dans la politique de l’eau sud-africaine tout comme dans d’autres objectifs futurs, que nous atteindrons également en veillant à la cohérence de nos pratiques. Les normes font partie intégrante de notre démarche en faveur d’une gestion durable de l’eau. 

Une culture de la qualité 

Lorsque l’on vise la qualité et l’excellence, les normes ISO sont d’une aide précieuse au moment de fixer des points de référence indispensables pour éviter tout dysfonctionnement dans la gestion de l’eau. Le South African Bureau of Standards (SABS) a adopté sans réserve les normes ISO suivantes, et cela a contribué à résoudre les principaux problèmes qui se posaient quant à la gouvernance de l’eau au Cap : 

  • Face à une crise, qu’elle soit due à des conditions météorologiques extrêmes, des pannes d’électricité ou des événements tels que la pandémie de COVID-19, il faut à tout prix continuer d’avancer. Pour assurer des services d’approvisionnement en eau et d’assainissement vitaux pour la population et éviter un scénario du type « Jour zéro », vous devez assurer la continuité de l’activité. Cela n’est possible qu’au travers de la mise en place de systèmes solides et robustes permettant la poursuite de l’activité en dépit des perturbations. ISO 22301 est une norme extrêmement utile pour l’adaptation et la prévention de tels risques opérationnels. La continuité est également essentielle pour la réalisation des Objectifs de développement durable des Nations Unies. 
     
  • Cela peut sembler surprenant s’agissant de la gouvernance de l’eau, mais ISO 22000, la norme relative aux systèmes de management de la sécurité des denrées alimentaires, est également un outil clé à nos yeux. En effet, nous considérons l’eau comme une denrée alimentaire. Produit consommable, l’eau doit être soumise à des contrôles aussi strictes que la production de denrées alimentaires afin que les consommateurs aient l’assurance que l’eau qu’ils consomment est de la plus haute qualité. Cette année, après cinq ans de travail acharné, l’Afrique du Sud devrait disposer pour la première fois de deux usines de traitement de l’eau certifiées selon ISO 22000.  
     
  • Le délestage électrique est pour nous un réel défi en termes de maintenance et de gestion des infrastructures. Pour y remédier, nous mettons en œuvre ISO 50001, la norme relative au management de l’énergie. Nous sommes impliqués dans divers projets de soutien afin de veiller à ce que la gestion de l’eau dans la province du Cap-Occidental soit alignée sur cette norme. Ainsi, nous sommes en mesure d’assurer un approvisionnement durable en eau douce à toutes celles et tous ceux qui sont reliés à notre réseau d’approvisionnement en eau. 

Il y a de nombreuses années, je menais seul une campagne en faveur de l’adoption des normes ISO. Aujourd’hui, nous formons une équipe et nous constatons collectivement tout l’intérêt de l’application de ces normes et à quel point elles nous aident à créer un cadre et une culture de la qualité dont les effets se font sentir à tous les niveaux : tous les chefs de projet, fournisseurs et partenaires de la chaîne d’approvisionnement en eau du Cap sont désormais en conformité avec les normes ISO ou certifiés selon ces dernières.  

Il reste encore beaucoup à faire. Mon but est de faire en sorte que cette nouvelle culture de l’excellence puisse être transposée dans d’autres domaines de la gouvernance de l’eau, notamment au sein des administrations locales et nationales. Je suis convaincu qu’une ville comme Le Cap et une Afrique du Sud fondées sur ce modèle seront prêtes à relever toute sorte de défis. 

Services publics et décideurs politiques : une imbrication étroite 

La gouvernance de l’eau n’est que l’une des composantes d’un effort plus large en faveur de la durabilité. Mon travail au Cap s’inscrit dans le cadre de la législation et des objectifs environnementaux nationaux, ainsi que des efforts déployés partout dans le pays en vue d’atteindre les Objectifs de développement durable. La loi sur la gestion de l’environnement adoptée par l’Afrique du Sud (NEMA) souligne clairement la nécessité d’une « gouvernance environnementale fondée sur la coopération ». En assurant la conformité aux normes ISO de la chaîne d’approvisionnement en eau du Cap dans son ensemble, nous nous employons activement à répondre aux exigences et aux objectifs environnementaux à l’échelle du pays. 

Les normes ISO nous donnent les moyens de jouer pleinement notre rôle dans ce vaste dispositif de gouvernance. Elles sont en outre toujours plus adoptées au niveau des politiques, statuts et règlements partout en Afrique du Sud. Leur impact sur le paysage législatif sud-africain est également considérable en termes de politique environnementale, de gouvernance, de santé et de sécurité. 

Surmonter les obstacles 

Notre travail au Cap (et au-delà) n’est pas terminé pour autant. Les modèles climatiques anticipent des risques de sécheresse pluriannuelle jusqu’à cent fois plus élevés en Afrique du Sud d’ici la fin du XXIe siècle si nous ne prenons pas les mesures de précaution qui s’imposent. Par ailleurs, sans l’appui des normes, nous risquons une défaillance des processus et l’effondrement des systèmes. Le recours aux normes pour contrôler l’utilisation de l’eau et la rendre plus efficace tout en préservant les réserves d’eau pour l’avenir est d’une importance vitale pour notre pays. 

J’espère de tout cœur que mes travaux inciteront d’autres municipalités sud-africaines à suivre l’exemple du Cap. Mais il ne faut pas se leurrer, la voie à suivre sera semée d’embûches. Il nous faut créer un système fort et cohérent, fondé sur des normes clés afin que la charge que représente la promotion d’une meilleure gestion de l’eau ne repose pas sur une seule personne ou organisation. Nous devons en outre garder clairement à l’esprit le retour sur investissement potentiel associé à l’application des normes ISO, et pas uniquement en termes financiers. Nous pouvons aider d’autres municipalités à rattraper Le Cap, non seulement pour leur permettre de faire des économies, mais aussi pour assurer le bien-être et l’avenir de la population de notre merveilleux pays dans son ensemble. 

Je suis sans cesse inspiré par les gens et l’environnement, car c’est pour les aider et les protéger que j’agis. Ce n’est pas chose aisée et cela ne se fait pas toujours sans heurts ou aussi rapidement qu’on le souhaiterait, mais c’est crucial pour notre avenir. « La qualité signifie bien faire les choses quand personne ne regarde ». C’est précisément ce que je m’efforce de faire depuis des années, et je continuerai d’agir ainsi pour mes enfants, leurs enfants, l’avenir de l’Afrique du Sud et de la planète tout entière. 

 

À propos de Mario Carelse

Mario Carelse, Directeur, Amélioration opérationnelle et innovation, Direction de l’eau et de l’assainissement de la ville du Cap, est un auditeur principal certifié, chargé de mettre en avant la résilience de la capitale provinciale en matière de gestion de l’eau, au travers de stratégies d’adaptation fondées sur les normes. Il a occupé pendant dix ans le poste d’auditeur principal au sein du South African Bureau of Standards (SABS) et possède plus de 20 ans d’expérience dans le domaine des normes de systèmes de management.

L’atteinte de l’objectif de réduction à zéro des émissions nettes n’est pas seulement un impératif environnemental : elle offre aussi de nombreuses opportunités aux organismes, quelle que soit leur taille.

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